C’est aussi la personne la plus proche de Justin Trudeau qui a témoigné jusqu’ici devant la Commission sur l’état d’urgence, chargée de déterminer s’il était justifié pour le gouvernement fédéral d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence pour mettre fin à la crise – appelée le convoi de la liberté l’hiver dernier. La comparution de Mme Thomas à la barre des témoins jeudi a soulevé de nombreuses questions. Il a dit que juste au moment où le gouvernement jouait avec l’idée de recourir à des mesures d’urgence – une loi de dernier recours – le commissaire de la GRC n’a pas informé le cabinet que sa force de police n’avait pas épuisé tous les moyens légaux à sa disposition pour réprimer les manifestations. . S’il y a des informations critiques, elles devraient être fournies, que vous soyez ou non sur la liste des orateurs, a déclaré le conseiller à la sécurité nationale, faisant référence à une réunion du 13 février où le commissaire Lucki n’aurait pas réussi à prendre la parole pour exprimer son opinion et, notamment, pour signal que le plan de la GRC était prêt à être exécuté. Je ne me souviens pas que le cabinet en ait été informé. Jody Thomas a également déploré le manque de preuves d’un plan réalisable de la GRC prêt à être exécuté. Mardi, lors de son propre témoignage devant le comité Rouleau, la commissaire Brenda Lucki avait plutôt soutenu, pour sa part, qu’elle n’avait jamais eu l’occasion de partager explicitement son opinion sur le recours aux mesures d’urgence avec les membres du gouvernement Trudeau. La commissaire de la GRC Brenda Lucki, lors de son témoignage mardi devant la Commission Rouleau Photo : La Presse canadienne/Adrian Wyld Le gouvernement Trudeau a invoqué la Loi d’urgence le 14 février 2022 pour mettre fin à un rassemblement de camionneurs et d’autres manifestants opposés aux mesures sanitaires liées à la COVID-19 qui ont paralysé le centre-ville d’Ottawa du samedi 29 janvier au dimanche 20 février. Cette loi – votée en 1988 pour succéder à la Loi sur les mesures de guerre – prévoit notamment qu’une enquête publique doit principalement examiner les circonstances qui ont conduit les autorités à prendre une telle décision.

Identifier la menace

Des documents déposés plus tôt cette semaine auprès du comité de Rouleau montrent également que Mme Thomas l’hiver dernier a vu les manifestations au centre-ville d’Ottawa et près des postes frontaliers comme une menace pour la démocratie au Canada. Sans passer par les voies officielles, il avait également demandé une évaluation de la menace à la GRC, quelques heures seulement avant que Justin Trudeau n’annonce l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence. Jeudi, il a fait valoir que cette évaluation n’était jamais venue. Mme Thomas a notamment contesté le fait que le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) ne percevait pas le « convoi de la liberté » comme une menace à la sécurité nationale, pourtant nécessaire pour déclencher les mesures d’urgence. L’avocat a soutenu que le gouvernement a droit à une définition plus large que l’article 2 de la Loi sur le SCRS, qui renvoie à la Loi sur les situations d’urgence. De plus, il croit que la définition fournie par la Loi sur le SCRS, qui a été rédigée il y a 30 ans, est trop précise et désuète. “Je ne dis pas que nous devrions étendre [la définition de menace à la sécurité nationale de la Loi sur le SCRS], mais modernisez-le. » — Une citation de Jody Thomas, conseillère à la sécurité nationale du premier ministre Justin Trudeau Bref, le consultant estime que le recours à la loi d’urgence était nécessaire pour mettre fin à la crise du convoi de la liberté.

Inquiétudes sur l’industrie automobile

Le témoignage de Jody Thomas a été précédé jeudi par le témoignage de Michael Sabia, Rhys Mendes et Isabelle Jacques, trois hauts fonctionnaires du département du Trésor du Canada. Selon eux, la reprise économique après la COVID-19 a été si fragile que les perturbations à la frontière, si elles s’étaient poursuivies, auraient pu avoir un impact économique important, notamment sur l’industrie automobile. Isabelle Jacques (à gauche), Michael Sabia (au centre) et Rhys Mendes (à droite) du Département du Trésor du Canada ont témoigné jeudi devant le Comité sur l’état d’urgence. Photo : La Presse canadienne/Adrian Wyld Plus que la prise de contrôle du centre-ville d’Ottawa, les barrages de Windsor, Sarnia, Emerson, Coutts et Surrey étaient une grande préoccupation, a déclaré le sous-ministre Michael Sabia, qui a précédemment présidé le conseil d’administration de la Banque de l’infrastructure du Canada (BIC). C’était une période très délicate à l’époque, se souvient-il, à cause de la pandémie de COVID-19, mais aussi de l’invasion russe imminente de l’Ukraine. L’une des craintes du département du Trésor était que le Canada ne soit plus considéré comme un bon partenaire commercial par les États-Unis, la Maison Blanche étant en train de revoir sa façon de faire des affaires avec les États-Unis. M. Sabia craignait, entre autres, que les Américains commencent à douter qu’ils puissent compter sur le Canada comme source d’approvisionnement fiable et qu’ils délocalisent leur production ailleurs dans le monde, ce qui pourrait avoir un impact important sur le PIB et le développement du pays. « Si les troubles frontaliers s’étaient prolongés, la perception qu’avaient les États-Unis du Canada en tant que partenaire commercial loyal aurait été ébranlée, et les conséquences à long terme auraient été très préjudiciables à toutes nos exportations, en particulier le secteur automobile. » — Une citation de Michael Sabia, sous-ministre des Finances Agrandir l’image (Nouvelle fenêtre) La situation était tendue autour du pont Ambassador l’hiver dernier. Photo : La Presse canadienne/Nathan Denette Le blocus du pont Ambassador, par exemple, avait déjà contraint certaines usines automobiles des deux côtés de la frontière à réduire leur production. Pour cette raison, Unifor avait même proposé au gouvernement de Doug Ford d’envoyer des syndicalistes sur le terrain pour démanteler le barrage par la force, a récemment appris le comité. Le gouvernement du Canada et le gouvernement de l’Ontario étaient particulièrement préoccupés par l’impact économique du barrage de Windsor. Et pour cause : année après année, 75 % des exportations canadiennes vont aux États-Unis. À l’époque, Ottawa tentait également de faire abandonner à Washington une mesure issue du plan Build Back Better qui aurait exclu les véhicules électriques assemblés au Canada d’un crédit de taxe d’accise. Et les barrages routiers ont nui à ces efforts, selon M. Sabia. Ce n’était pas un problème secondaire dans les relations canado-américaines, c’était un problème majeur, a-t-il déclaré au comité jeudi. Ottawa a finalement convaincu Washington d’étendre le crédit d’impôt aux véhicules électriques assemblés au Canada. Mais les blocus, qui faisaient à l’époque l’objet d’une importante couverture médiatique aux États-Unis, ont failli tout faire dérailler, a fait valoir M. Sabia. Les véhicules électriques sont l’avenir de l’industrie automobile, a-t-il souligné. Donc, si nous n’avions pas été en mesure de le faire, les conséquences pour l’industrie automobile du centre du Canada auraient été très, très graves. À ce jour, le ministère des Finances n’a pas encore présenté d’évaluation de l’impact économique de tous ces barrages routiers.

Près de 300 comptes gelés

M. Sabia, qui était accompagné jeudi des responsables Isabelle Jacques et Rhys Mendes, a également confirmé que 280 comptes bancaires appartenant à des manifestants ayant pris part à des rassemblements illégaux avaient été suspendus par des institutions financières au Canada. Les donateurs qui ont contribué aux différentes campagnes de financement participatif visant à soutenir les manifestants n’ont jamais été inquiétés, a-t-il également assuré. Au total, environ 8 millions de dollars d’actifs ont été gelés après l’invocation de la loi d’urgence. Les comptes des manifestants ont été rouverts les 21 et 22 février, dans les 48 heures suivant la fin de l’occupation du centre-ville d’Ottawa, a déclaré Sabia. Techniquement, l’accès à ces actifs a été suspendu par les institutions financières, qui avaient reçu une liste de personnes liées à des rassemblements illégaux aux mains de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). La décision a cependant été prise par le gouvernement fédéral, a reconnu Sabia jeudi. Nous définissons les politiques et nous en sommes responsables, a-t-il déclaré lors de son interrogatoire. La fermeture du pont Ambassador et d’autres barrières frontalières a eu des conséquences tangibles, a déclaré jeudi le sous-ministre des Finances du Canada, Michael Sabia. Photo : La Presse canadienne/Adrian Wyld Ces politiques visaient à encourager les manifestants à abandonner les manifestations et à décourager ceux qui voulaient y participer. Nous n’avons jamais eu l’intention de nuire à leurs familles, s’est défendue Isabelle Jacques lorsque les procureurs ont laissé entendre lors de leurs plaidoiries que le gel des comptes des manifestants avait un effet direct sur leurs proches.

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